Lettre ouverte au CA SmartBE

Mesdames, messieurs les membres des Conseils d’administration de SmartBE,


Devant l'urgence, nous, salarié.es coopérateurs et coopératrices de SmartFR prenons la parole. Dans la tourmente d’un plan social qui a débuté il y a 3 mois. Nous souhaitons être entendu.e.s et écouté.e.s par la gouvernance de notre coopérative, en Belgique, là où est né Smart. Là où s'est écrit l'histoire d'une mutualisation des outils et des humains au service de l'innovation sociale.


Nos intentions sont claires. Nous souhaitons rétablir le dialogue, comprendre ce qui a mené les directions et les gouvernances à aller à l'encontre du plan de continuation défendu pendant plusieurs mois. Plan auquel nombreux d’entre nous ont adhéré, et sur lequel nous avons travaillé dur, et travaillons encore.


Quelle est la situation aujourd’hui ?

Jeudi 10 février 15h57, un mail de la direction signé par les Conseils d’administration français annonce l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire de SmartFR. Cette annonce tombe comme un coup de massue. Après plusieurs mois de négociations entre le CSE, les syndicats et la direction dans le cadre régi par la loi, nous avions espoir que le calendrier soit respecté et que le plan social soit enfin mis en oeuvre au mois de mars.

Cette annonce signe un ultime rebondissement, faisant voler en éclats les quelques espérances qui restaient au sein de notre collectif de salarié.e.s, soudé malgré les difficultés en chaîne


La situation aujourd’hui est donc celle-ci : l'ouverture d’une procédure de redressement judiciaire qui pourra être effective dès le 16 février.

Le risque de liquidation est réel et périlleux. Il impliquerait un licenciement de l'ensemble des salariés sans aucune indemnité, et la fermeture des activités de nos sociétaires sans garantie de récupération de leur trésorerie. A ce mot, liquidation, c'est toute notre vision du modèle coopératif qui tremble :

  • Quid de la confiance que nos sociétaires ont mis dans nos actions ?
  • Quid de leurs trésoreries, fruits de leur travail et ressources éminemment vitales ?
  • Quid de leurs prestations déjà prévues et parfois négociées dans la douleur étant donné le contexte global déjà connu ?
  • Quid, enfin, du projet Smart ? De la quête de justice sociale au travers l'accès à la protection sociale ?


Aujourd'hui, ces mots mis bout à bout sonnent faux : Smart - justice - protection. Mais nous ne désespérons pas. Les choses peuvent encore changer.
Difficile de comprendre cette situation sans effectuer un retour sur les évènements de ces derniers mois.


Tout commence par la crise sanitaire dont le monde entier a du mal à sortir. Le plan Corona est déployé. La coopérative est une force en France, en Belgique. Nous devons faire face à cette situation inédite et nous le faisons main dans la main. L'ambition européenne du projet Smart, incarnée par la coopération belgo-française, prend alors tout son sens. Nous avons été témoins, mais aussi acteurs.trices de la solidarité et de la responsabilité dont Smart a su faire preuve lors du plan Corona.


Puis la situation se corse en France avec "la crise Pôle Emploi". Il n’est pas question de revenir ici sur les détails de cet évènement mais seulement de rappeler que nous, SmartFr, y perdons 4000 membres actifs, près de 50% de notre chiffre d’affaires et notre coeur de métier : le spectacle vivant.

Là aussi, nous avons continué d'assumer nos missions malgré des outils défectueux, nous nous sommes constamment adapté.e.s en prenant sur nous. Tout au long de ces mois en eaux troubles, nous avons essayé de garder Smart à flot et d'en assurer la pérennité, convaincus du projet politique et social de la structure.

De cette série d'évènements nait la stratégie 2021, censée redresser la barre pour Smart Belgique et France, et donner le cap pour les années à venir. 27 projets prioritaires, dont certains, binationaux, sont lancés. Un management par le projet est mis en place avec la nomination de coordinateur.trice.s de projet.

Ce mode d'organisation, qui ne convient pas à toustes, va rapidement générer un cran supplémentaire d'incompréhensions et du mal-être dans les effectifs. Qui est responsable de quoi ? Qui fait quoi ? Quand ? Comment ? Pourquoi ?

Alors même que les équipes se positionnent sur ces projets et mettent du coeur à l'ouvrage, des départs de collègues et de responsables à des postes clés se font brutalement, sans être remplacés. L'organisation du travail s'en trouve encore un peu plus déstabilisée et les équipes, diminuées.

Les arrêts maladies, les burn-out de collègues proches se succèdent, les conditions de travail sont à ce stade délétères, mais on continue, on y croit, on ne lâche pas. (Voir le rapport de l’Enquête Santé que nos représentants du personnel ont réalisé).

 

Et alors que nous nous pensions au coeur de cette crise : notre DG démissionne.

Mai 2021, on découvre à cet instant une carence de gestion colossale voire abyssale et historique de Smart FR, dont personne ne veut être tenu pour responsable. La crise n’est plus seulement conjoncturelle, elle est structurelle.

Le recrutement d'une direction générale externe appelée de leurs voeux par les présidences des CA français ne se produit pas comme prévu. Emily Lecourtois est la seule à se proposer au poste de DG. Un plan de restructuration voit le jour sans réinterroger le modèle et ses acteurs et un consultant RH est appelé en renfort, très vite dépassé lui aussi par l'ampleur de la crise.

Septembre 2021, les négociations avec le CA belge sont apparemment des plus serrées d'après notre nouvelle DG. En découlent des mesures radicales qui entendent assurer l'aide financière de la Belgique. Parmi elles : le Plan de Sauvegarde de l'Emploi.
Pendant plusieurs mois, nous vivons quotidiennement au rythme des annonces de la direction. Annonces que les représentants du personnel viennent régulièrement préciser ou contredire. Le flou est insupportable.

Le couperet tombe : le contenu du PSE nous laisse pantois.

  • 63 postes supprimés sur 71 postes existants, soit 91% de nos postes.
  • Proposition de reclassement interne sur la nouvelle organisation cible pour certaines personnes, organisation dont les contours restent inconnus.
  • Des prévisions qui reposent sur des informations lacunaires.

Les réunions entre les organisations syndicales et la direction se tiennent difficilement, le travail de la direction est retoqué par la DREETS car il ne répond pas aux critères légaux, comme nous en avaient avertis nos syndicats.

Pendant ce temps, les salarié.e.s sont au travail et participent à la réflexion sur la nouvelle organisation cible. Ils veulent en être, pour pouvoir se projeter, reprendre un peu le pouvoir d'agir sur leur propre sort.

 

Cela nous amène à janvier 2022. Les négociations prennent du retard, l'anxiété est à son paroxysme. Les temps de discussions avec la direction sont annulés ou reportés.

Les services de Smart sont au ralenti, plus de service facturation alors que nous avons cruellement besoin de recouvrer nos factures, plus de service informatique, plus de responsable hiérarchique pour les salarié.e.s DOP depuis plusieurs semaines. Plus rien ne semble tenir. Quand, comment cela va-t-il se finir ?

 

Nous voilà ici. Entre temps, un CA acte le redressement judiciaire et rebat à nouveau toutes les cartes. On pensait avoir touché le fond, même avoir un peu gratté, mais là on a le vif sentiment de vivre l'enfer, la boule au ventre ne nous quitte plus.

La fatigue psychologique et physique est telle que la colère est bien pâle.

Le redressement judiciaire de SmartFR est la pire option.

Le sentiment de trahison est énorme. Qu'est-il advenu du plan de continuation censé nous protéger de cette éventualité ? Censé garantir la mise en oeuvre d'un Plan Social dont on espérait qu'il préserve un minimum la dignité des personnes ? Où est la transparence ?

Dégagez, y’a plus rien à voir. Après ce que nous avons vécu.

Quel avenir pour les collègues mères célibataires ? Les salarié.e.s de plus de 50 ans ? Les femmes enceintes ? Quelle protection ?

Nos représentant.es ont demandé à plusieurs reprises à pouvoir rencontrer les administrateurs.trices de SmartBe, sans succès. Nos collègues belges ne semblent pas informés de la situation de Smartfr. La coupure a été brutale, sans plus aucune nouvelle du jour au lendemain.

Nous nous sentons isolé.es. Nous voulons être reçu.es et entendu.es. Sommes-nous condamné.es au silence ? Nous croyons que l’indifférence n’a pas sa place au sein de la coopérative. Nous croyons aux valeurs qui ont constitué la coopérative et ses actions. Nous interrogeons ici la capacité de notre groupe, de notre coopérative à pouvoir sortir de cette crise par le haut, à se démarquer des stratégies antisociales des entreprises capitalistes. Où sont les mécanismes de solidarité de notre coopérative de l’économie sociale et solidaire pour faire face à cette crise économique, sociale, humaine ?

Nous vous lançons une alerte, à vous, administratrices et administrateurs belges vous êtes les seuls à pouvoir encore agir. Vous tenez notre dignité entre vos mains.

Stoppez ce redressement judiciaire qui nous condamne à la mort sociale ! Ré-ouvrez le dialogue.

Il y a urgence, nous avons besoin que vous nous apportiez votre aide dès aujourd'hui car dans une semaine il sera trop tard.

Premiers signataires :

Marguerite Mérieux
Lintermans Alex
Adélaïde Richard
Aïcha Chibatte
Sara Louail
Julie Thorel
Gwendoline De Barros
Anaïs Broch
Margaux Levallois
Baptiste Marais
Georgia Walter
Delphine Jay
Charlotte Cascales
Tangi Jehanno
Angéla Convers
Thomas Gold
Sarah Ponceblanc
Isabelle Triboulloy
Nathalie SANTERNE
Laura Lartigaud
Arnaud Broucke
Guillaume Outrequin
Lucile Reynaud Cohen
Lucie Savina
Francina Espuny
Mariachiara Verrigni
Marina Hesry
Isabelle Steux
Moïra Richards
Gregory Lambot
Claire Bariseau
Violaine Bourdon katounke
BIH Daplé Narcisse
Adrien Monier
Antoine Chambaud
Aurélien Alphon-layre
Nina Iacoponelli
Dorothée Stern
Élodie Bouteille
Paul-Alain Boulvert
Sophie Colson Jordan


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