Sauvons la Forêt de Taillard

La CCMP des Monts du Pilat diffuse depuis ce 2 décembre 2016, un clip video de 3'25" dans lequel les intervenants sont MM. Guillaume SABOT et Philippe HEITZ, qui se présentent comme membres du Comité Stratégique de la "SAS Les Ailes de Taillard", l' un pour le compte de la CCMP, l' autre pour celui des actionnaires "participatifs"...

Ce clip est visible sur le site de Facebook de la CCMP :

https://www.facebook.com/ccmp.montsdupilat/?fref=nf 

Je l' ai écouté attentivement, et j' ai retenu que les arguments proposés par les deux intervenants sont toujours les mêmes, que je vais donc analyser au sens critique dans mon propos suivant...

Philippe HEITZ tout d' abord, présente deux sortes d' arguments :

- le projet est participatif, avec 3 collèges d' intervenants, la CCMP à travers la SEM-Soleil, les collectivités publiques ne pouvant investir directement dans des projets industriels, les citoyens (ou plutôt 120 individus à peu près) et quelques associations telles les CIGALES ensuite, et enfin l' industriel QUADRAN. Ce que HEITZ ne nous dit pas, c' est que le passage de la phase "développement" à la phase "réalisation" du projet entraînera un bouleversement des équilibres dans le financement et les mécanismes décisionnels de la SAS ; n' oublions pas que ce projet se chiffre à un montant total de 40 à 45 millions d' euros, lequel doit être autofinancé à hauteur de 20% à peu près pour trouver des crédits auprès des banques. Un schéma de financement provisoire (sous-estimé, à mon sens) prévoit déjà le passage à 5 millions d' euros de fonds propres, qui seraient souscrits à 80% par QUADRAN, 15% par la SEM-Soleil, prête-nom de la CCMP, et 5% par le collège citoyen... Cela représente 750 000 euros à la charge de la CCMP, 250 000 pour les associations et citoyens : ces sommes sont loin d' être anodines, et la CCMP a-t-elle le droit de risquer l' argent public, celui des citoyens, dans un projet à la rentabilité et l' intérêt douteux ? Juridiquement, elle en a le droit à travers la SEM, mais sûrement pas moralement !!! Ensuite, les équilibres décisionnels au sein des instances de la SAS vont se trouver modifiés : si rien ne changerait pour le "Comité Stratégique", dont on sait le peu de pouvoirs, au sein de l' Assemblée Générale des Actionnaires, les voix de QUADRAN passeraient de 50 à 75%, donc une majorité absolue pour décider de tout ! La CCMP et les citoyens n' auront plus aucun poids au sein de cette instance...

- le projet a pour objet essentiel de lutter contre le réchauffement climatique, puisque l' éolien n' émet "pas de fumées, pas de déchets nucléaires, et ne prend pas de terres agricoles"... dixit P. HEITZ (comme si la forêt n' était pas une activité agricole). Là on mélange tout, et on confond fumées (particules fines) et GES/CO2, les vrais responsables du réchauffement. Accessoirement, on ajoute une dose de déchets nucléaires, en oubliant totalement que le nucléaire n' émet pas de CO2 ni de particules fines, et que l' éolien n' a jamais eu vocation à se substituer au nucléaire, de l' aveu même de QUADRAN (réponses de QUADRAN dans l' autorisation de défricher). On peut faire rappel aussi de ce qu' une tranche nucléaire type centrale de Saint-Alban produit autant d' électricité que 1 500 éoliennes de 3MW comme celles prévues à Taillard... Mais surtout, est-ce que l' éolien c' est une économie de 12 à 15 000 tonnes de CO2 par an pour le projet de Taillard ? J' ai déjà démontré sur ce site que pour une production escomptée de 66 000 MWh/an, le projet permettra mathématiquement 2900 tonnes/an, sur la base RTE de 45 grammes de CO2/KWh, seule valable et cohérente pour la production électrique de la France. Mais c' est un calcul purement mathématique, et l' on doit aussi tenir compte des moyens thermiques mobilisés pour produire lorsqu' il n' y a pas ou pas assez de vent : et là, l' éolien c' est epsilon de CO2 en moins, si l' on tient compte de l' électricité thermique importée, comme en ce moment, c' est même plus de CO2 au fur et à mesure que l' on construit des éoliennes (comme en Allemagne).

Alors, oui, il est clair que Philippe HEITZ se plante sur toute la ligne !!!

Guillaume SABOT ensuite : ce Monsieur qui est aussi Maire de GRAIX, d' où les éoliennes ne sont même pas visibles, et accessoirement Technicien de l' ONF, ce qu' il a oublié de préciser...

Il nous dit que le projet a été concerté depuis longtemps, que les citoyens ont approuvé ses tenants et aboutissants : mais on sait à quel point cette concertation s' est faite à sens unique, avec des méthodes dignes du bourrage de crânes en vigueur dans les pays totalitaires, avec des moyens dédiés par la CCMP, sous forme de brochures, clips comme celui dont nous parlons, réunions publiques où l' on évite de donner la parole aux opposants identifiés, et j' en passe...

Ensuite, il tente maladroitement de nous convaincre de l' absence de nuisances d' un projet qui serait "loin des habitations" (mais visible de très loin, en ligne de crêtes, ce qui est aberrant), "sur des espaces certes replantés, mais qui ont été fragilisés par la tempête de 1999, et ne portant pour l' essentiel pas atteinte à la forêt mature"... Tout cela souffre critique, comme les multiples contestations du permis de défricher l' ont montrées ; mais surtout, G. SABOT ne dit pas un mot sur la ressource en eau qui est menacée, rien sur la flore et surtout la faune, qui devraient être parmi les préoccupations majeures d' un technicien ONF, à moins qu' il ne s' intéresse qu' au cubage des grumes !

Le plus choquant dans ce "clip", c' est qu' il est diffusé, outre le sigle et le "couvert" de la CCMP, sous l' égide du "TEPOS" (Territoires à Energie Positive du Ministère de l' Environnement, de l' Energie et de la Mer) et plus grave, sous celui du PNR du Pilat, ce qui est proprement scandaleux !!! Et pour terminer, qui a payé pour la réalisation d' un clip qui promeut une société de droit privé, même si elle comporte des participations publiques ???

La CCMP ferait beaucoup mieux de s' informer sur l' évolution prévisible des conditions d' insertion de l' électricité éolienne sur les réseaux, et des conditions de rachat, car au plan européen elles sont en train d' évoluer, et demain, elles le feront aussi au niveau national : il est peut-être temps de faire marche-arrière pour NE PAS S' ENGAGER DANS UN PROJET QUI NE SERA PAS RENTABLE...