Migrants : le Pays Voironnais doit être solidaire

RLF Voironnais

/ #34 Voiron- Victorine a fui le Congo avec ses deux enfants sous le bras (Dauphiné Libéré 11/09/2015)

2015-11-12 11:49

Victorine habite Voiron, dans un tout petit logement géré par le Logis des Collines. Elle vient de la République démocratique du Congo, est arrivée clandestinement et a obtenu le statut de réfugiée. Aujourd’hui, elle a une carte de séjour, travaille et a deux enfants scolarisés. Son histoire est faite de violences, de précarité et d’énormément de courage.

« Mon compagnon était membre d’un parti opposant à Kabila (président de la RDC). Début 2012, il a été arrêté par la police. Des policiers sont venus un jour chez nous. Il y a eu des violences. Mon compagnon a été mis en prison. Ses amis m’ont dit qu’il fallait que je parte avec les enfants [elle en a trois], car ils allaient revenir pour nous tuer. »

Un oncle et un ami de son compagnon l’aident à passer en France, avec de faux passeports. « J’ai donné tout ce que j’avais, 2 500 dollars. Mon oncle m’a aidée. En tout, je ne sais pas combien ça a coûté, plus de 6 500 dollars. Mais il n’y avait pas assez pour mes trois enfants. Mon oncle m’a dit : “Pars avec les deux derniers, je t’enverrai ta fille aînée la semaine qui suivra ton arrivée en France.” Elle est toujours au Congo. »

« Maintenant, c’est à toi de te débrouiller »

Victorine part donc avec une de ses filles de huit ans et son jeune fils de deux ans et demi. Un ami prend l’avion avec elle jusqu’à Paris. « Arrivé à Paris il m’a dit : “Voilà 20 € pour acheter à manger aux enfants. C’est à toi de te débrouiller. Tu vas y arriver. Prends le TGV pour Grenoble, voilà les billets.” J’ai suivi son conseil. Arrivée à Grenoble, j’ai trouvé la préfecture. Il y avait une file d’attente tellement longue… On n’a pas été reçus. Mon fils pleurait. On a dormi dans une maison en construction pas bien loin. Le lendemain matin à la première heure on est retournés à la préfecture, il y avait déjà énormément de monde. Une personne de l’ADA [Accueil demandeurs d’asile] m’a vue et nous a trouvé un hôtel. Ça n’est qu’au bout de trois semaines que j’ai pu arriver à un guichet de la préfecture. »

« Je devrais être morte quelque part en Afrique, mais j’ai réussi »

Le chemin est encore très long pour obtenir le statut de réfugié, puis la carte de séjour. Elle se retrouve en foyer au Péage-de-Roussillon pendant un an et huit mois, puis doit laisser la place et dort un temps parmi les clochards à Grenoble, toujours avec ses enfants. « J’appelais le 115 tous les jours, j’ai tapé à toutes les portes pour sortir mes enfants de là. Un jour, au 115, on m’a dit d’aller à Voiron. J’y suis allée et le Logis des Collines m’a prise en charge, le Secours catholique aussi. Ce sont des gens merveilleux, qui nous ont tendu la main. Je n’oublierai jamais ça. C’est une vraie famille pour moi. »

Ça n’est qu’en juillet 2014 que Victorine obtient un titre de séjour, avec l’autorisation de travailler. « J’ai réussi. Je devrais être morte quelque part en Afrique mais j’ai réussi, j’ai sauvé mes enfants. Je ne crains plus rien maintenant, je suis libre. Je travaille pour l’association Adéquation, j’en suis très fière. Mais je prie tous les jours pour que ma fille nous rejoigne. J’ai vécu des choses dures et je ne dors qu’avec des médicaments. Et je ne sais rien de mon mari. Est-il en vie ? Je n’ai pas de nouvelles. »

Par M.R. | Publié le 11/09/2015