Migrants : le Pays Voironnais doit être solidaire

Ras L' Front, comité du Voironnais

/ #24 Réfugiés et aides sociales : les intox de Pierre Lellouche (et de beaucoup d'autres)

2015-11-03 17:10

Surtout depuis ce que les médias nomment "la crise des migrants", l'extrême-droite a multiplié  la fabrication et diffusion d'intox, falsifications des faits, trucages-photos; etc. Tout cela d'attiser peurs et haines racistes et pour en tirer bénéfice. Dans la droite dite "classique", on fait également  bien trop souvent usage de cette démagogie xénophobe et honteuse... 

Souvent ces mensonges sont diffusés en connaisssance de cause, comme dans le cas présent du député LR P. Lellouche. Ainsi LIBERATION rappelle que ce député est bien informé de la réalité quand il parle en réunion avec ses collègues députés, mais n'hésite pas à recourir à l'intox anti-migrants quand il parle sur des médias comme RMC ou BFM-TV. Ici,  à la fin de cet article :  Non, un «réfugié politique» n’a pas droit à 700 euros par mois

 

Réfugiés et aides sociales : les intox de Pierre Lellouche

Le Monde | 02.11.201

Le député (LR) de Paris, Pierre Lellouche, invité de RMC, a assuré que « l’Europe n’est pas une terre d’asile », et que « ce sont des dizaines et des centaines de personnes qui vont arriver ». Surtout, selon M. Lellouche, un réfugié politique aurait droit à plus d’aides « qu’une famille modeste » : 700 euros par mois, selon lui.

Ce qu’il a dit :

« Aujourd’hui, un réfugié politique, en France, il a droit à 700 euros par mois, il a une priorité au logement, il a droit au transport gratuit, toutes sortes de choses auxquelles la famille modeste ici n’a pas droit »

Pourquoi c’est faux

1. Un peu de vocabulaire

Lorsque l’on parle d’immigration, on a souvent tendance (les politiques les premiers) à confondre plusieurs notions :

- un demandeur d’asile est une personne qui cherche à obtenir un statut de réfugié auprès d’un pays. Durant l’examen de sa demande, il peut être aidé, mais peut aussi se voir refuser sa requête, et donc devoir – en théorie – quitter le pays. En pratique cependant, nombre de déboutés du droit d’asile restent en France, devenant de fait des immigrés clandestins (ou « sans-papiers ») ;

- un réfugié est une personne qui a obtenu le droit d’asile, et donc un statut officiel l’autorisant à rester, ainsi que son conjoint et leurs enfants mineurs, en France durant dix ans. Il a ensuite accès à plusieurs aides et dispositifs.


On compte en France aujourd’hui environ 175 000 réfugiés et le droit d’asile a été accordé, en 2014, à 14 564 personnes, pour 64 536 demandes.

2. Que touchent les réfugiés ?

Une personne qui a obtenu le statut de réfugié obtient un permis de séjour de dix ans en France, le droit de travailler et l’accès au contrat d’accueil et d’intégration (CAI), un « forfait » qui inclut des formations en langue et un bilan de compétences professionnelles. Mais elle ne touche aucune aide spécifique.

En réalité, un réfugié a accès à la même chose que les Français : allocations (familiales et logement), prestations sous conditions de ressource, revenu de solidarité active (RSA) s’ils n’ont aucun revenu, et couverture maladie universelle (CMU). Ces deux dernières allocations ne sont versées qu’aux réfugiés n’ayant aucun autre revenu. Dès lors qu’ils travaillent, les réfugiés cotisent et sont assujettis aux mêmes régimes que les nationaux.

Un réfugié n’a donc ni accès à 700 euros par mois, ni à davantage d’aides qu’une famille française modeste : il a les mêmes droits et les mêmes aides que cette famille, dans les mêmes conditions. Il a ainsi accès aux aides au logement ou à des logements sociaux, mais sans obtenir de priorité automatique du fait de son statut de réfugié : une mère célibataire réfugiée en France avec trois enfants sera considérée au même niveau qu’une mère célibataire française par les offices HLM.

De même, il n’y a pas de « transports gratuits » spécifiquement destinés aux réfugiés : là encore, ceux-ci ont accès aux aides données aux plus modestes par les conseils généraux et régionaux, dans les mêmes conditions.

-> Ce tableau résume qui a droit à quoi

3. Mais alors de quoi parle M. Lellouche ?

En réalité, M. Lellouche a mélangé deux choses : les réfugiés et les demandeurs d’asile. Il parle donc probablement ici de demandeurs d’asile et de l’allocation temporaire d’attente (ATA).

L’ATA était jusqu’ici versée aux demandeurs d’asile en attente d’instruction du dossier, à condition de ne pas être hébergé dans un centre d’accueil. Pour la percevoir, il fallait ne pas dépasser un certain revenu : 524 euros pour une personne seule, 700 euros pour un couple, jusqu’à 1 571 euros pour un parent seul avec quatre enfants mineurs.

L’ATA était de 11,45 euros par jour, soit 343,50 euros par mois. Elle n’était accordée que durant l’instruction de la demande d’asile, ou durant la durée la protection temporaire ou subsidiaire (des variantes de l’asile).

Mais, et M. Lellouche, en tant que député, ne devrait pas l’ignorer, la loi a changé. Un texte, voté le 29 juillet, réforme le droit d’asile et cette allocation, qui disparaît pour les demandeurs d’asile. Une nouvelle allocation pour demandeur d’asile la remplace, dont les conditions d’attribution n’ont pas encore été précisées par décret.

Les demandeurs hébergés en centre d’accueil ont eux aussi accès à une aide, plus modeste : l’allocation mensuelle de subsistance (AMS) de 91 euros par mois pour une personne seule et qui peut grimper jusqu’à 791 euros par mois pour une famille de six enfants.

Enfin, signalons que les personnes en situation irrégulière ont accès à quelques aides, notamment l’aide médicale de l’Etat (AME) qui leur donne donc la gratuité des soins.

 

4. Grands mélanges et petits calculs

Sciemment confondre un réfugié, à qui la France a accordé sa protection au terme de l’examen de son dossier, un demandeur d’asile, dont le dossier est en cours d’examen, et un immigré clandestin, présent dans le pays sans titre de séjour ni justification, contribue à créer la confusion, et à donner une vision caricaturale de situations complexes.

On ne parle pourtant pas franchement des mêmes chiffres : on compte en France 178 000 personnes qui ont le statut de réfugié (en 2014). La plus grande majorité provient… d’Asie. Il s’agit assez souvent des anciens boat people des années 1980. Entre 10 000 et 15 000 personnes par an obtiennent ce statut.

Les demandeurs d’asile sont plus nombreux (51 000 demandes pour 14 000 admissions en 2014), et la question de leur devenir lorsqu’ils sont déboutés reste posée, la France ayant le plus grand mal à les expulser du territoire. Mais ces personnes qui restent en France sans statut sont alors des clandestins, qui n’ont pas droit à beaucoup d’aides, essentiellement l’aide médicale d’Etat (AME).