Pétition au Grand Conseil contre la diminution des heures d’enseignement de l’espagnol au collège et la dissociation de l’enseignement de la langue et de la culture
La dernière réforme du programme de maturité en Suisse prévoit un nouvel équilibre entre l’enseignement des sciences et des humanités, au détriment notamment de l’enseignement de l’espagnol.
À l’heure actuelle, l’espagnol peut être choisi comme option spécifique dans sept sur les dix établissements d’enseignement secondaire à Genève. La langue et la culture sont enseignées de pair, de manière progressive, à raison de trois heures hebdomadaires la première année, quatre les deuxième et troisième année, et cinq heures la dernière année.
Dans les scénarios envisagés, non seulement il y aurait moins d’heures d’enseignement de l’espagnol dans l’ensemble du parcours gymnasial, mais aussi une dissociation entre la langue, ses littératures et ses cultures. La réforme préconise en effet de combiner l’enseignement de l'espagnol avec celui de l’histoire générale ou avec celui de la littérature comparée, ce qui, d’une part, ne peut que diluer l’attention portée sur la langue elle-même, ainsi que sur les spécificités des cultures hispaniques, et d’autre part, pose des difficultés méthodologiques d’envergure, que les enseignant-e-s du secondaire n’ont pas manqué de signaler, sans avoir réussi à obtenir des réponses cohérentes à leurs questions.
Quiconque habite à Genève sait pourtant que l’espagnol y a une place importante, la Suisse étant de fait « le pays européen (hormis l'Espagne) où la présence relative de personnes de langue maternelle espagnole est la plus élevée » (rapport Kabatek et al., 2022 : 211*), avec une forte présence de Suisses d’origine espagnole et hispanoaméricaine, ainsi que qu’une population immigrante hispanophone en croissance, particulièrement en Suisse romande. L’espagnol n’est ainsi pas seulement présent dans le domaine économique et diplomatique à Genève –s’agissant de la 4e langue la plus parlée au monde, et la quatrième langue officielle des Nations Unies – mais il est très présent dans le paysage culturel genevois. Selon l’Office cantonal des Statistiques, entre 2018 et 2022 l’espagnol était la troisième langue la plus parlée, après le français et l’anglais ; à Genève, un habitant sur dix désignait l’espagnol comme une de ses langues principales, et un habitant sur quinze était originaire d’une culture hispanique...
Réduire les heures d’enseignement de la langue et la dissocier de sa richesse historique et culturelle semble donc aller à l’encontre des besoins d’une grande partie de la population genevoise, et contre les tendances du paysage citadin. Parmi les implications négatives d’une telle mesure, on peut imaginer une perte d’intérêt pour un système éducatif qui ne tient pas compte de la configuration de son réseau social, qui néglige l’importance d’un apprentissage solide des langues comme l’espagnol dans l’espace professionnel de Genève, siège de la politique internationale, et qui s’aligne de manière irréfléchie sur un idéal de connaissance abstrait, ahistorique et aculturé.
C’est pourquoi les soussigné-e-s demandent au DIP de suspendre les mesures à l’encontre de l’espagnol, et de lancer une consultation large et démocratique sur le futur de l’enseignement de cette langue et de ses cultures.
* Kabatek, Johannes et al. (2022), Demolingüística del español en Suiza. El español en Europa con un anexo sobre el español en Liechtenstein, Instituto Cervantes/Universidad de Heidelberg/Universidad de Zúrich.
Commission mixte de l'Unité d'espagnol de l'Université de Genève Contacter l'auteur de la pétition