soutien à Bruno Deffains

LFL

/ #15 Re:

2013-02-22 14:21

#1: -

Adopter une législation serait effectivement un progrès souhaitable alors que les politiques gouvernementales successives ont poussé les enseignants-chercheurs à trouver des financements privés pour poursuivre des recherches que l'argent public ne peut plus payer. Cette clarification est nécessaire mais en  l'espèce, avant même que se pose éventuellement la question de financements que Bruno Deffains aurait pu pervevoir (ce qu'il a démenti), c'est déjà la position de la Justice qui soulève débat.

Il est quand même dommage que l'on ne se réfère pas déjà aux principes existants. A cet égard, le Conseil Constitutionnel a déjà proclamé (décision du 20 janvier 1984) que l'indépendance des professeurs d'Université était un principe à valeur constitutionnelle et cela a été aussi réaffirmé dans la loi sur l'enseignement supérieur du 26 janvier 1984 : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d’une pleine indépendance et d’une entière liberté d’expression dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et dans leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions de la présente loi, les principes de tolérance et d’objectivité ». Depuis quand appartient-il au juge judiciaire d'apprécier, au premier chef,  l'objectivité d'un travail scientifique? Il existe des instances pour cela, notamment le Conseil National des Universités, si un doute a été émis quant à la méthodologie ou aux résultats d'une étude.

Utiliser la voie judiciaire au lieu des mécanismes de contrôle entre les pairs soulève ainsi la question de la compétence du Juge judiciaire. On peut décliner à l'envie les conséquences que pourrait avoir un tel précédent : dès qu'une étude scientifique ou un article universitaire aurait l'effet de déplaire, il suffirait d'émettre un doute quant à l'indépendance de son auteur... "Chercheurs : circulez, il n'y a rien à voir !"

La régularité de la procédure de perquisition au domicile du Professeur pour saisir ses travaux soulève ainsi de graves questions, de fond et de forme. On remarquera au passage que si Bruno Deffains avait eu un bureau à l'Université, c'est au sein de l'Université même que cette perquisition aurait eu lieu...  Une petite voix pourrait même se demander si ce n'est pas parce que Bruno Deffains travaille souvent sur l'(in)nefficacité de la Justice en France, que cette dernière a voulu faire preuve de tant de célérité... Les explications du Procureur sur la justification de cette procédure particulière sont donc attendues.

Un autre aspect de l'affaire mérite enfin d'être abordé : celui de la publicité qui en a été faite. Ce ne sont pas tant les travaux en cause qui ont géné M. Neel mais l'article qui en a rendu compte auprès du grand public dans le Journal des Echos. La presse dérange quand elle parle. Mais elle dérange aussi quand elle se tait : le silence assourdissant du journal Le Monde sur cette affaire révèle des conflits d'intérêts bien plus graves que les conflits d'intérêts supposés de l'enseignant en cause. La transparence à sens unique en quelque sorte.