Non à la venue de McKinsey à l'ULB

L'ULB à vendre ? Refuser l'arrivée de McKinsey c'est refuser la marchandisation de l'ULB !

Les autorités de l’ULB négocient avec la firme de consultance internationale McKinsey & Company l’implantation de celle-ci sur le campus de la Plaine. Comme bien d’autres acteurs de la communauté universitaire, les organisations syndicales signataires s’opposent à la venue de McKinsey sur nos campus, même si cela signifie de renoncer à de nouveaux moyens financiers. Pourquoi ?

 

Ceci n’est pas un contrat de bail : le véritable intérêt de McKinsey

Les autorités voulaient que cette négociation soit tenue secrète. On doit au courage des étudiants administrateurs de savoir ce qui se trame, malgré les baillons mis en place par la nouvelle gouvernance. Désormais que le projet est sur la place publique, les autorités nous disent qu’il est purement immobilier, un simple contrat de bail en somme…

Voilà une présentation qui ne convaincra personne. Il y a actuellement à Bruxelles plus d’un million de m² de bureaux vides1. Pourquoi McKinsey attendrait plusieurs années et paierait un prix supérieur à celui du marché pour occuper des bureaux qu’elle pourrait trouver pour moins cher dès demain ? Parce que son intérêt est ailleurs…

 

Son intérêt, c’est précisément d’être ici, sur le campus de notre université. Pourquoi ? Parce que jouer la confusion géographique et sémantique avec les Universités, c’est la stratégie mondiale de la société McKinsey, et la note confidentielle du recteur démontre bien qu’il en est conscient2. Cela crédibilise les produits qu’elle vend : du conseil, des rapports et des programmes d’enseignement. Ainsi, la firme s’est déjà installée sur la campus Victoria de l’Université de Toronto3. Elle ne manque pas de rappeler systématiquement sa proximité avec les campus universitaires. Elle a son propre centre de recherche, le « McKinsey Global Institute »4, son propre journal, le « McKinsey Quarterly »5, et sa propre Académie, qui vend désormais aussi de l’enseignement6. Elle prétend même organiser sa propre Université… la « McKinsey Alpine University »7. Au vu de cette stratégie, il n’est pas étonnant que le Doyen de la Columbia Business School de New York déclare au Financial Times que, lorsqu’on lui demande quels sont ses futurs concurrents, il indique que « McKinsey Academy est sur la liste »8.

5000m² de bureau à rénover dans 20 ans sont-ils suffisants pour offrir à la société McKinsey la légitimité scientifique qu’elle n’a pas et lui laisser vendre, demain, ses formations organisées sur notre campus en donnant l’illusion à ses clients de suivre un cursus universitaire ? Devons-nous accueillir une société commerciale qui cherche tant à jouer la carte de la confusion avec le monde universitaire et qui envisage de le concurrencer demain ? Certainement pas.

 

De quoi la société McKinsey est-elle le nom ? De valeurs qui ne sont pas celles de l'enseignement public et de l'ULB

Entrer dans un partenariat avec McKinsey, c’est apporter notre soutien à certaines valeurs et à une certaine conception de la société. Des valeurs que nous ne partageons, ni sur le plan de la gestion du personnel, ni sur le plan de ce que l’enseignement et l’Université doivent devenir.

 

- Une gestion du personnel inacceptable : McKinsey est une entreprise de consultance de stature mondiale qui conseille les plus grandes entreprises et les pouvoirs publics, aussi, en matière de gestion du personnel. Quelle gestion préconise McKinsey ? Celle du nouveau management public, celle de la gestion par objectif, du lean management, de la privatisation et des partenariats public-privé. Concrètement, à l'ULB, les nouveaux projets du Directeur Général (réformes des carrières qui limite les perspectives d'évolution des travailleurs, modification des conditions d'octroi d'avancement ou de promotions, ...) sont dans la droite ligne de cette vision de gestion des travailleurs, et ne pourraient être que le début. Par ailleurs, dans son rapport sur les universités américaines, McKinsey9 préconise de faire payer aux travailleurs et aux étudiants tous les services, à commencer par les parkings. Un conseil qui semble avoir déjà convaincu nos autorités… Refuser d’accueillir McKinsey à l’ULB, c’est aussi refuser de poursuivre dans la voie d’une managérialisation complète de notre institution.

 

- Un projet pour l’enseignement imbuvable : McKinsey, c’est aussi une certaine vision de l’enseignement qui devrait être à la fois privatisé et plus proche des besoins des entreprises (« education-to-employment »10), loin de nos idéaux libre-exaministes. Cette vision de l’enseignement, McKinsey la promeut partout où la firme passe, non sans anticiper les bénéfices qu’elle pourrait elle-même réaliser sur le grand marché qu’elle appelle de ses vœux. Elle a désormais l’oreille de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour la réforme de l’enseignement obligatoire dans le cadre du Pacte d’Excellence11. Tous ceux qui sont attachés à un enseignement public, critique et de qualité, devraient s’opposer au projet d’ouvrir à McKinsey les portes de notre université. Accepter l'installation de McKinsey c'est de facto accepter un système de marchandisation de l'enseignement.

Nous comprenons bien l’intérêt financier que trouve l’ULB dans ce projet, nous ne sommes pas sourds au sous-financement dont elle est victime, mais c’est justement parce que nous sommes attachés à notre université, à ses missions, à ses travailleurs et à ses valeurs que nous ne pouvons accepter l’implantation de McKinsey sur nos campus.

De plus, nous pensons qu'il est essentiel de questionner l'intérêt financier réel que représente ce projet. Recevoir 5000m² de bureau dans 20 ans implique qu'il faudra alors les rénover, ce coût est-il évalué ? Rappelons également que la dernière fois qu'un bâtiment devait-être construit par le privé sans rien coûter à l'ULB (bâtiment Solvay), l'histoire s'est terminée très différemment et l'ULB a du mettre la main au portefeuille.

 

Les organisations syndicales signataires demandent l’abandon total des négociations avec la société McKinsey & Company.

Elles invitent également tous ceux qui souhaitent les rejoindre dans leur opposition à signer le présent texte.

 

L’argumentaire de cette pétition est largement tiré du travail des universitaires désexcellents sur le site desquels vous trouverez encore plus d’informations argumentées et documentées : http://lac.ulb.ac.be/

 

1 L’édition 2015 de l’Observatoire des bureaux de la Région de Bruxelles-Capitale dénombre précisément 1 028 821m de bureaux vides sur le territoire régional (disponible en ligne sur le portail http://urbanisme.irisnet.be).

9 Page 10, "Rethinking 101: A new agenda for university and higher education system leaders?" - Adam Cota et al., McKinsey & Company, June 2012. 

Signez la pétition contre la mise en place d'un paiement pour l'usage des parkings de l'ULB par ses travailleurs : http://www.petitions24.net/je_refuse_de_payer_mon_parking_a_lulb

10 M. Mourshed, J. Patel, K. Suder, Education to Employment : Getting Europe’s Youth into Work, The McKinsey

Center for Government, 2014.