Pour le maintien des cinémas de proximité au cœur de nos villes

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Visiteur

#78 Re: Re: bin moi je dis tant mieux

2012-12-14 20:48

#77: Cathy - Re: bin moi je dis tant mieux

ca sens le patron du rio ca

Réponses

Jérôme

#85 Re: Re: Re: bin moi je dis tant mieux

2012-12-16 05:07:44

#78: - Re: Re: bin moi je dis tant mieux

Non absolument pas. Une coordinatrice au Rex à La Réole, et ma collègue.

Ce serait bien que lorsque vous exposez votre point de vue, avec des référentiels qui sont les vôtres, qu'ils soient justifiés ou non, vous acceptiez un peu aussi en retour qu'on vous présente une réponse en relation avec une expérience du métier sans que vous vous sentiez automatiquement offusqués ni que vous nous accusiez systématiquement de délit de mauvaise foi. En retour nous pouvons nous aussi nous sentir insultés vu le nombre de prises de positions peu documentées auxquelles on est exposés, ici ou ailleurs sans forcément faire de cas particulier, et qu'elles soient pro ou anti-multiplexe. On se voit beaucoup donner des leçons et on n'y répond jamais de manière violente.

Il a été question de cohabitation. Oui, absolument, dans une grande ville, multiplexes commerciaux cohabitent avec complexes Art&Essai type Utopia. Mais on est d'accord sur un point : tout ça se passe dans les grandes villes. Il est évident qu'à Bordeaux centre, le "vide" laissé par CGR et Megarama en terme de cinema d'auteur (depuis quelques années contrebalancé par UGC qui y a vu un intérêt) est entièrement comblé par Utopia, qui fait vraiment du bon boulot. Situation à peu près équivalente à Toulouse. Et dans ces villes très peuplées, il y a profusion de public pour tous les styles de cinéma. Chacun y trouve son compte (sauf le Jean Vigo qui a mis la clé sous la porte il y a quelques années mais c'est une autre histoire) et l'offre est régulée.

Dans nos cinémas, l'Art&Essai représente 45 à 70% de nos séances, pour 20 à 40% de nos entrées. Imaginons que nous n'ayons plus que ces films à programmer. Le modèle Utopia peut-il fonctionner dans nos campagnes ? D'expérience, je peux vous assurer que non. Nous sommes des salles généralistes avant d'être des salles Art&Essai, et pour équilibrer notre activité, et satisfaire noS publicS du mieux que l'on peut avec les moyens que l'on a, nous programmons tous les styles de films. Si cet équilibre est lésé, notre activité est mise en difficulté. Bien que nous ne pouvons pas vraiment nous comparer à des commerçants (nous ne vendons pas de biens, nous n'avons pas de stock, nous ne faisons pas ou peu de bénéfice), c'est un peu comme si vous disiez demain que l'unique tabac-presse de votre village ne peut plus vendre de tabac... C'est ce qui arrivera si un multiplexe à visée commerciale avec mineure Art&Essai (entendre par là : programmation ciblée sur les films à potentiel succès, prolongation des titres qui cartonnent, retrait des films qui ne font pas assez d'entrées dès la fin de la première semaine et exposition de quelques films Art&Essai dit "porteurs" sur quelques séances : genre La Piel que Habito, The Tree of Life, Amour) obtient le droit de s'installer à Langon : bien que rien ne nous en empêchera en théorie ; dans la pratique nous aurons de très grandes difficultés pour accéder aux films grand public et Art&Essai dits porteurs dans des délais raisonnables car les mécanismes de la distribution sont tels. Malgré le numérique, le nombre de copies d'un film reste limité de manière à ce que tous les cinémas ne puissent pas programmer tous les mêmes films en même temps. Une concentration de ces films sur un seul établissement entraînera forcément pour nous des difficultés d'accès à ces films à cause de notre proximité géographique avec le multisalles. Ce genre de souci se pose souvent, et même en ville, par exemple à Paris où un cinéma comme le Balzac sur les Champs se voit parfois refuser l'accès à des films porteurs car le multiplexe situé plus haut sur l'avenue les a déjà. Dans ce cas de figure, si on met de côté toute velléité d'ordre éthique, il suffit au public de traverser la rue pour voir son film dans l'autre ciné. Dans notre situation, c'est un peu plus grave : on obligerait le public non-langonnais à faire jusqu'à 20 à 30km de plus pour voir le film. Certains spectateurs le feraient, d'autres non. Certains auraient accès au film dans des conditions moins favorables, d'autres n'y auraient simplement plus accès, par choix ou par force.

Ensuite, c'est un cercle vicieux. Moins de films entraînent moins de public, moins de public entraîne moins de séances, moins de séances entraine encore moins de films, etc.

Nous ne craignons pas simplement que ce multiplexe nous prenne notre public, mais qu'il nous empêche de travailler. On ne parle plus de concurrence dans le sens le plus pur du terme lorsqu'on parle de cinéma, ce serait trop simple (et franchement on se prendrait moins la tête). Dans un mécanisme de concurrence, chaque commerçant détient une offre équivalente, et un stock propre. Malheureusement, le "stock" des films, lui, est limité et inextensible...

Une fois fragilisés par les conséquences de ce handicap de programmation, nous aurons toutes les peines du monde à poursuivre le travail d'accompagnement des autres films moins médiatisés, ainsi que toute notre action culturelle (celle qu'on ne voit pas et qui dépasse souvent les murs de nos salles), car le déséquilibre budgétaire entraîné nous contraindra à licencier une partie de nos personnels. Et lorsqu'il n'y a plus de gens pour le faire, le travail ne se fait plus... Et on laisse une population perdre un service de proximité supplémentaire. Et ce ne seront pas les subventions qui viendront rééquilibrer cela : nous n'avons de cesse d'optimiser notre fonctionnement pour réduire notre impact sur les fonds publics.

Voilà pour ce qui reste de possibilités de cohabitation et pour ce qui est une des raisons de notre mobilisation.

Ensuite, l'état de nos salles nous préoccupe particulièrement. Certaines sont très récentes. Pour les autres, des projets sont en cours, et verront le jour... sauf si la force des choses (et le pouvoir de l'argent) nous en empêche...

Et en ce qui nous concerne, la température dans la salle ne dépasse jamais les 25 degrés même en temps de canicule... et ne passe en dessous des 19 que quand il fait -5 dehors...