Alerte! Les restaurateurs francais du patrimoine sont en danger!

Quoted post

I

#80 L'aficionada des toiles

2016-03-29 12:24

La définition même du statut de restaurateur est difficle à poser, on navigue tous entre volonté de reconnaissance de nos savoirs et savoirs-faires et l'humilité qui découle de notre métier. Je me considère autant qu'en tant que théoricienne que praticienne. Il faut 10 ans pour apprendre notre métier et c'est vrai que la part pratique est importante dans les formations actuelles. Mais, à titre d'exemple, quand je suis sortie de l'école je ne connaissais pas toutes les réalités du terrain, en particulier pour le travail des MH. On a beau avoir vu un décrochage d'une oeuvre dans une église, le traitement d'un grand format en peinture en stage ce ne sont pas des acquis. Il est à mon sens important de retrouver ce système de transmission qui existait dans les ateliers autrefois à travers l'apprentissage après une formation scolaire. Donner l'opportunité à un jeune diplômé de continuer à apprendre à la fin de ses études serait le meilleur moyen d'arrêter d'avoir peur du nouvel arrivant sur le marché. Ce lien valoriserait autant le restaurateur expérimenté qui souhaite transmettre toute son expérience que le jeune diplomé qui apprendrait les réalités de terrain et les savoirs-faires de toute une génération qui partira malheureusement sans laisser cet "héritage"précieux. Heureusement pour nous, pour l'instant, de nombreux gros ateliers parisiens et des restaurateurs individuels courageux continuent à transmettre ce savoir-faire mais combien de temps avant qu'il n'ait pu les moyens financiers de pourvoir embaucher ou faire de la sous traitance avec les jeunes diplomés.

Il y a de nombreux problèmes dans notre métier mais celui qui me parait le plus grave, avec celui du financier bien sur, c'est le manque cruel de communication entre nous. Hors mis notre cercle de collaborateurs/rices, nous avons tendance à nous regarder en chien de faiençe et à se méfier de l'autre, éternel concurrent qui va nous voler notre peu de travail. Certains collègues vont même jusqu'à "esquinter" la réputation de son rival pour obtenir un marché public. Nous sommes arrivés à un tournant où le métier doit se réformer, mieux communiquer sur notre métier auprès des élus et de la population, je ne dis pas qu'il faut tous se mettre en cage comme pour la restauration du Courbet :), j'aime avoir ma tranquillité dans mon atelier mais il faudrait faire l'effort de mieux expliquer notre métier et pourquoi pas un guide à destination des élus sur les principes de la conservation-restauration et les interventions de bases pour qu'ils soient mieux informés. Ils n'attendent d'ailleurs que ça, ils sont tout autant que nous passionnés par leur patrimoine.

L'initiative de la FFCR est à saluer mais malheureusement elle ne représente plus vraiment la profession. Combien d'entre vous se sont ré/inscrits? Plusieurs de mes collègues ne le faisaient que pour la présence sur l'annuaire mais ils ont décidé de ne pas renouveler cette année. Personnelement, je ne l'ai jamais fait, je ne me suis jamais reconnue dans leurs objectifs. Après c'est le chien qui se mord la queue car avec l'association nous avons un bon outil à disposition mais personne n'est disposé à s'investir pour nos revendications et nos attentes, à par ceux déjà présents et qui doivent éxecutuer un travail de titan. La preuve il n'y a que très peu de commentaires sur la pétition sur le forum. La ffcr va rencontrer la conseillère de la cuture, alors que vous soyez ou non inscrit sur la FFCR, allez-y! On vous donne un espace de parole il serait bien de l'investir pour que les délégués de la FFCR arrivent avec tout le soutien du corps de métier et avec vos revendications!

 

Réponses

Gwenola

#81 Re: L'aficionada des toiles

2016-03-29 13:11:24

#80: I - L'aficionada des toiles 

Tout à fait d'accord avec vous sur la nécessité de travailler avec des confrères et consoeurs plus expérimentés en sortant, mais encore faudrait-il que ces derniers aient suffisamment de travail pour pouvoir prendre un jeune diplômé sous leur aile !

L'idéal évidemment serait que, comme dans certaines écoles d'ingénieur publiques, on doive faire quelques années au service de l'Etat... Mais il faudrait qu'il y ait des restaurateurs dans les services publics pour les encadrer !

Par contre, je vous trouve dure avec la FFCR. Dommage pour ceux qui ne s'inscrivent que pour être dans l'annuaire (et en même temps, c'est déjà au moins un soutien  financier à l'asso).Dommage pour ceux qui ne s'y inscrivent pas par principe, en restant sur le passé. Dommage pour ceux qui pensent que ça ne vaut pas la peine d'investir 200 € par an de cotisation pour une asso qui fait pourtant tant pour la communauté.

Et qu'on ne me parle pas de raisons financières (surtout qu'il y a depuis cette année un tarif social). Moi je me suis inscrite au moment le pire de mon parcours, la fatidique 3è année... où j'ai gagné en tout et pour tout 4000 € sur l'année, à cause d'un mauvais chiffre d'affaires et d'un rattrapage de charges des 2 premières années. C'était l'année de création des délégations régionales et je me suis lancée comme déléguée en Bretagne et Pays de la Loire. Je n'y ai rien gagné financièrement bien sûr, c'est une fonction bénévole, mais ça m'a permis de tenir moralement. Je me disais que si je devais arrêter, au moins j'aurais fait tout ce qui était possible, je n'aurais rien à me reprocher. J'y ai rencontré des personnes super, dont certaines même qui m'ont tendu la main et proposé de travailler un peu avec eux, bien qu'elles n'avaient pas non plus des situations mirobolantes, mais juste un peu plus de travail que moi. J'y ai appris beaucoup, sur le fonctionnement des institutions publiques, les politiques culturelles, l'histoire de la profession. Je pense avoir un tout petit peu compris certains mécanismes pervers qui ont créé la situation actuelle. Bref, j'y ai fait mon éducation critique, bien plus que dans les cours théoriques de l'INP (qui étaient à l'époque dispensés uniquement par des conservateurs).

Aujourd'hui à la FFCR, il y a "de tout" si je puis me permettre de parler ainsi de mes consoeurs et confrères que je croise quand je viens aux réunions des délégations régionales et à l'AG : des membres "historiques" (je n'ai pas dit des dinosaures !), beaucoup de jeunes diplômés ces derniers temps, des femmes, des hommes (moins, on n'a pas la parité, mais dans l'autre sens), toutes disciplines confondues, toutes formations confondues et même des formations "non reconnues par le ministère" puisqu'il y a une commission d'adhésion, des optimistes, des pessimistes... mais tous des gens engagés, ce qui fait que de façon générale c'est très sympa. Il y a de super moments, il y a de grosses enguelades, des démissions, des frayeurs (plusieurs fois j'ai cru que l'asso allait exploser), des joies...

Quand vous parlez de "leurs objectifs", mais on a droit de parole et de contestation au sein de la FFCR ! Plus que ça, on en a besoin pour avancer (bon il faut quand même que ce soit constructuf bien sûr). Personnellement je ne suis pas en accord avec tout ! Mais je le dis, et je me sens écoutée ! C'est bien la richesse que crée un groupe hétérogène.

Vous reconnaissez en tous cas le travail de titan, et pour ça je vous remercie. Moi qui ne suis "que" déléguée régionale, je mesure le travail du CA, je ne sais même pas comment ils trouvent encore le temps et l'énergie pour travailler à côté. C'est énorme. Et pour ceux qui trouvent que ça n'est pas assez, je trouve qu'ils sont injustes. La situation n'est peut-être pas brillante, mais sans la FFCR ce serait pire encore : beaucoup de choix politiques désastreux ont pu être évités au cours des années. Mais c'est comme la conservation préventive : ça ne se voit pas beaucoup !