Alerte! Les restaurateurs francais du patrimoine sont en danger!

Quoted post

Françoise Sinier de Ridder

#69

2016-03-27 07:39

Je reviens sur cette pétition que j'ai signé. 

le problème des restaurateurs du patrimoine oeuvrant dans les collections publiques est d'un autre ordre.  Personne ne conteste l'amour de l'Art et autres balivernes consensuelles, c'est le fond, la restauration des oeuvres conservées (ou futures) qui pose problème, pas l'appellation "métier d'Art" ou autre détail de pure forme. Confieriez-vous votre vie ou votre santé, celle de vos proches, à un médecin qui aurait fait ses 10 ou 15 ans d'études compliquées oui, difficiles bien sur, longues en effet, mais ensuite sans aucune expérience de terrain, d'atelier, de réel? C'est là le vrai problème. Les musées se sont enfermés dans une situation ubuesque et bien ridicule, voulant se garder quoi? des petits privilèges? du prestige? je ne sais pas, mais maintenant, seuls, sans l'aide ni le soutien des professionnels de la restauration patrimoniale rejetés car non titulaires de ces fameux "diplômes exigeants", ils pleurent leurs manques de moyens, de connaissances techniques, et de la difficulté d'exercer, ils souffrent d'être appelés "Métier d'Art" (ce qui n'est quand même pas une insulte bien subversive) et excusent leur manque d'idées et d'événements culturels par une situation non maitrisée...……

Il y a des restaurateurs du patrimoine, toutes catégories confondues, qui travaillent à plein temps, pour les collections privées qui ne sont pas moins bonnes ni moins exigeantes que les publiques, qui gagnent bien leur vie (j'en suis), et qui organisent des expositions, des événements culturels de qualité, des grandes restaurations patrimoniales, des prêts d'objets patrimoniaux, des communications, des colloques, des partages, des publications, des ateliers, des rencontres, des échanges, et surtout des transmissions de savoir,  il est juste regrettable que les musées s'en soient exclus au nom de je ne sais quelle supériorité intellectuelle auto-decernée. 

 

Pour les courageux, les récits de mes tentatives "habilitation musées" ici :

http://www.sinier-de-ridder.com/habilitation-restaurateur-des-musees.html

 

et ma page facebook consacrée à ce sujet : facebook : Restaurer les oeuvres des musées par Sinier de Ridder

et encore quelques articles dans la presse dont "le paradoxe des musees" :

Le paradoxe du musée.   Les musées, qui sont à la fois notre mémoire, notre culture, et notre trésor national, se retrouvent depuis la "Loi musées" de 2004 devant un bien curieux problème.   Ils doivent donc conserver et restaurer les œuvres d'art qu'ils exhibent pour un public de plus en plus assidu composé d' étudiants, d’érudits, de chercheurs, de simples badauds amateurs et curieux, et de professionnels qui trouvent là les références patrimoniales nécessaires à l’exercice de leur profession.   Conscient du manque de savoir-faire des conservateurs de musées qui sont le plus souvent des universitaires. L'inp, Institut national du patrimoine, a crée un diplôme d'état qui met les musées français en adéquation avec les autres musées européens, un diplôme de "conservateur-restaurateur" qui permet à ses diplômés d'intervenir dans les collections publiques. Ces jeunes diplômés, pourvus d'un assez solide bagage universitaire mais sans aucune expérience technique, mécanique ou simplement manuelle de la restauration des oeuvres, de l'expertise ou de la maintenance, écument les appels d'offre des musées (obligatoires) pour décrocher les contrats de restaurations.   Ces diplômés sont spécialistes non pas d'une technique ou d'un savoir précis : l' horlogerie, l' ébénisterie, la peinture ou bien la lutherie, mais d'un matériau précis : le bois, la pierre, le métal, le cuir ou le textile. Ainsi un "conservateur-restaurateur bois" peut restaurer un escalier, un bateau, un meuble, une charpente ou un instrument, toute époque et style confondus mais ne pourra toucher au textile ou au métal.   Prenons un musée dans cette situation particulière de recherche de restaurateurs pour ses collections : le Musée des musiques vivantes de Montluçon, avec pour objectif la ré-ouverture en juin 2013 de ses portes. Ce musée a fait un appel d'offre "restaurations", et un jeune diplômé "inp" a répondu puisque seul habilité à le faire. Reconnaissant son ignorance totale des instruments de musique et de leurs singularités (la lutherie n'entre pas dans le cursus "conservateur-restaurateur") il a fait appel à d'autres, des "intervenants", à charge pour chaque sous-traitant d'assurer telle ou telle autre restauration ou partie de restauration, selon sa spécialité s'il en a une.   La restauration des instruments de musique, leur conservation ou leur maintenance sont une chose complexe. Les instruments sont le plus souvent composés de plusieurs matières différentes : bois, métaux, tissus, nacre, os, etc…. Ils appartiennent à des époques, à des lieux, à des cultures et à des techniques différentes, ont très souvent été remaniés pour suivre la pratique musicale, ou "bricolés" par des mains enthousiastes, et, en plus de leur caisse matérielle, leur fonction spécifique, leur musicalité, mérite également la restauration.   Ainsi notre musée, désireux de montrer au mieux la richesse et la diversité de ses collections, n' a pas d'autre solution que de faire appel à un "conservateur-restaurateur agréé" qui n'a jamais vu au cours de son parcours le moindre instrument de musique… Tout au plus en a-t-il vu si il a visité le musée, derrière les vitrines, durant l'élaboration des cahiers des charges et des stratégies de restauration.   C'est le paradoxe de la "loi musées" de 2004.   C'est ce qui occupe le "Musée des musiques vivantes de Montluçon" en ce moment, la conservation-restauration d'un patrimoine très particulier, vielles à roue, cornemuses, guitares ou accordéons, par des personnes qui ne connaissent ni l’histoire ni les techniques ni les spécificités singulières de ces instruments de musique historiques et patrimoniaux, avant de pouvoir les remettre "restaurés" en vitrines pour l'édification de tous …   Une situation complexe, un curieux respect du patrimoine, qui, je l'espère, sauront se faire oublier lors de l'ouverture du beau et nouveau Musée des musiques vivantes de Montluçon.  

 

Dommage

 

Réponses

Claire d'Izarny

#75 Re:

2016-03-27 11:05:25

#69: Françoise Sinier de Ridder -  

  Je trouve un peu fort de café de traité un profession de environ 1600 conservateurs-restaurateurs diplômés des quatre formation habilité d’incompétents sous couvert qu’ils n’ont pas l’expérience et le savoir-faire des artisans d’art. Avez-vous une simple idée de la complexité de la profession ? conserver une œuvre n’est pas seulement agir dessus et lui rétablir sa musicalité, quand il s’agit d’objets de musique. Décision qui doit se décider au cas par cas en fonction du contexte. Une œuvre de musée n’a pas forcément pour fonction d’être encore utilisé mais est plutôt le témoignage de ce qui à exister.

D’ailleurs dans votre exemple concernant ce jeune restaurateur du patrimoine habilité musée, il a eu l’honnêteté de reconnaitre la limite de ces compétences et de faire appel aux professionnels qui eux ont le savoir-faire. Ceci est justement une des fonctions primordiale du restaurateur-conservateur, avoir suffisamment de connaissance technique et d’esprit critique pour savoir s’entourer de professionnels compétents.

Vous donnez en exemple un objet d’un type bien particulier qui a une fonction d’usage importante et qui dans certain cas mérite d’être restaurer, et d’ailleurs nous avons la chance qu’en France, ces savoirs faire traditionnels existe encore ce qui n’est pas le cas dans certains pays. Mais beaucoup d’autres œuvres n’ont pas cette fonction d’usage.

Par ailleurs je souhaiterai relever quelques approximations dans votre texte. Il y a dans les écoles habilités des formations spécialisé en peinture et sculpture notamment et pas seulement dans un « matériel particulier », d’ailleurs il y en a tellement qui ont été formé que beaucoup d’entre eux ne trouve plus assez de travail pour vivre. Ensuite, c’est vrai que les matériaux composite pose problème, mais nous sommes amenés dans notre formation à apprendre les propriétés de différents matériaux et les interactions des uns avec les autres.

Ensuite vous parler des « musées se sont enfermés dans une situation ubuesque et bien ridicule, voulant se garder quoi? des petits privilèges? du prestige? je ne sais pas, mais maintenant, seuls, sans l'aide ni le soutien des professionnels de la restauration patrimoniale rejetés car non titulaires de ces fameux "diplômes exigeants", ils pleurent leurs manques de moyens, de connaissances techniques, et de la difficulté d'exercer, ils souffrent d'être appelés "Métier d'Art" ». Ce ne sont pas les musées qui pleurent mais les conservateurs-restaurateurs qui dans leur très grande majorité ne travaillent pas dans les musées mais sont des professions indépendante a qui ont fait appels quand on en a besoin. Ensuite je vous ferais remarquer que nous sommes nous aussi professionnels avec un diplôme habilité des restaurateurs du patrimoine, puisque personne n’a voulu accepté notre spécificité de conservateur pourtant unanimement accepté dans les pays anglo-saxons et autre.

ET c’est bien là le problème, pour qu’un conservateur-restaurateur puissent exercer son métier dans toute sa définition il faudrait qu’il soit intégré dans les institutions muséales et patrimoniales afin qu’il puisse gérer les collections dans leur conservation matériel.

Nos métiers ne sont pas en rivalité mais complémentaire.

Je vous en donne pour exemple l’article (lien ci-dessous) concernant la conservation d’un Maori Waka (canoé de guerre) de Nouvelle Zélande. Un bel exemple de restauration en partenariat avec le conservateur de musée, un artiste ayant le savoir-faire et deux conservateurs-restaurateurs de musée. 

http://www.jcms-journal.com/articles/10.5334/jcms.1011202/