Refondation de l'école : les dindons prennent la parole

Thex

/ #68 A Mme Debby du Sud

2012-11-07 01:31

Ce n'est pas un instit qui vous parle... Enfin, je devrais plutôt dire, ce n'est plus un instit!
J'ai commencé ma vie professionnelle en tant qu'ingénieur informatique: un boulot qui me plaisait bien, un monde plein de promesses d'emploi à l'époque. J'y suis resté un petite dizaines d'années avec cette secrète envie de devenir instit, sans doûte l'influence de quelques formidables maîtres que j'avais eus dans ma scolarité. Je passe donc le concours, loin d'être une formalité croyez moi! Après ces 2 années de "formation" où l'on m'a davantage appris à ne pas me servir des manuels d'éditeurs plus qu'à tenir une classe, je me retrouve sur le terrain, rempli de bonne volonté et d'espoirs. Comme vous, je pensais qu'être maître d'école, c'était arriver le matin un peu avant la classe, surveiller les enfants pendant qu'eux enchainent les exercices de la page 38 du manuel, qu'être en récréation c'était se promener sur la cour avec un verre de café à la main en discutant avec ses collègues. Je me disais qu'en maternelle, on ne devait pas faire autre chose que colorier et chanter, tout cela dans le plus grand calme évidemment.La réalité était toute autre: au bout d'un an, j'ai fait un burn out,ben oui, vous pouvez glousser! Car ce que les instits proposent aux élèves, il faut le préparer: et moi, j'y passais mes soirées, le sacro saint mercredi où l'on préfère imaginer que l'instit boit son thé dans sa véranda en bouquinant un bon polar, j'y passais mon samedi, je m'offrais une pause le dimanche matin, et je m'y remettais l'après midi. Plus question de regarder un peu la télé le soir, pas le temps non plus d'aller voir les amis le week-end et les vacances, je les passais à essayer de m'avancer dans mon travail! En général, elles étaient coupées en deux: la première moitié, je laissais mon cartable de côté, l'autre moitié, c'était boulot! Vous faites cela aussi vous quand vous avez des vacances? Vous retournez chez votre employeur? Vous ramenez du boulot à la maison? Quand j'étais en maternelle, il me fallait plus d'une heure de préparation matérielle pour 20 minutes d'activités avec les élèves. Imaginez quand il faut tenir 6 heures face à eux le nombre d'heures que j'ai passé à découper, plastifier en 30 exemplaires, faire mes fiches de preps... Bref, tout cela se fait, que les élèves sont sympas, et les parents aussi, ce qui n'est pas toujours le cas.
Au bout de 3 ans, j'en ai eu ras le bol: Qu'est ce que j'avais gagné de ce changement de boulot? 15 heures de plus par semaine, un salaire presque divisé par 2 par rapport à celui qui était le mien, une vie sociale réduite à néant parce que j'étais toujours en train de bosser, mon conjoint prêt à se barrer, des amis qui se sont éloignés, ma santé qui en a pris un coup, une image de fainéant dans la société, des élèves que j'aurais voulu aider mais pas de Rased pour eux! L'Educaion Nationale m'appréciait au vu des rapports d'inspection. Mais moi, j'ai préféré revenir à mon ancien boulot où j'avais davantage de considération ( et je ne parle pas que financièrement)
Aujourd'hui, je sais que ce boulot, ce n'est pas tous ces clichés que vous avez en tête! Pour rien au monde, je ne voudrais y retourner... Alors, Madame, cela vous choque que l'on emploi le mot démissionnaire (ce que vous n'êtes sans doute pas), comme cela me choque que vous sous entendiez que les instits sont des fainénants. Moi, je ne rêvais que d'une chose: qu'on me donne une pointeuse pour compter mes heures de boulot alors que j'allais me coucher et que ma journée du lendemain n'était pas encore tout à fait prête!

Alors, les instits, même si vous devez encore croiser nombre de Mme Debby ( ce n'est pas entièrement de sa faute, il faut aussi dire que ça arrange certains gouvernements de persuader l'opinion publique que vous n'êtes pas des vrais travailleurs!), il y en a aussi qui ont changé d'avis sur les instits en commençant par mes amis qui vont d'ailleurs recevoir la pétition. Et je veillerai à ce qu'ils la signent!

Plein de courage!